Dominique
Comtat : l'insolite et le quotidien.
Rien n'est aussi banal
que le spectaculaire. Chacun s'en saisit, la
télévision ou le cinéma le
répercutent, les photographes amateurs l'enregistrent sans
défaillance sur leurs pellicules.
Le spectaculaire ressemble aux idées
générales de la philosophie : elles plaisent
parce qu'on peut en jouer, que chacun les entend, qu'elles ne
compromettent personne. De même le spectaculaire
séduit-il en raison de son caractère universel et
inoffensif.
Si les photos de Dominique Comtat surprennent vivement de prime abord,
c'est précisément parce qu'elles excluent le
spectaculaire, le coup dans l'oeil ou l'oeillade. Leur surface est
paisible et dégagée.
Mais il y a autre chose : Comtat ne nous livre aucune anecdote dans ses
livres d'images. Même lorsqu'il descend dans la rue,
photographie une manifestation, un rassemblement. Il évite
alors la scène que les autres photographient pour reporter
son attention sur un détail, sur une situation marginale
à l'évènement.
Comtat n'est pas un reporter. Son métier n'est pas de mettre
en boite, pour les conserver, des images préexistantes. Non,
lui crée des images. Des images que personne n'aurait vues
parce que c'est son intervention expresse qui les suscite.
Beaucoup de photographes ont envisagé une
démarche semblable. Mais en choisissant le plus souvent de
photographier des payasges urbains ou naturels, des
natures mortes, ou
bien des nus académiques. Des sujets où
l'anecdote
est absente de toutes manières.
Comtat travaille volontiers dans des lumières
contrastées pour projeter son image dans une sorte
d'objectivité, hors du champ émotionnel. Il peut
en résulter, chez le spectateur distrait, une impression de
froideur. Il faut prendre le temsp de séjourner dans les
images pour y déceler une certaine tendresse.
Une tendresse discrète, et même pudique. Un peu
celle que l'on rencontre chez Robert Doisneau.
Jean-Jacques Zuber, Journal de Sierre